L’humain, élément clé de l’analyse financière dans la décision de crédit

L’analyse financière humaine (fondée sur le raisonnement) consiste à comprendre la situation d’une entreprise à partir d’information et d’hypothèse dans la lecture du bilan, du compte résultat et des annexes. Cela permet par exemple d’établir la solvabilité et la rentabilité de l’entreprise afin d’établir des décisions de crédit.

Cette approche dans l’analyse des comptes sociaux est qualifiée de diagnostic. Elle extrapole le passé pour prévoir l’avenir court et moyen termes. Elle met en avant une méthodologie de raisonnement liant l’observation, la compréhension des données, des ratios financiers et de différents indicateurs sectoriels, économiques ou de vie l’entreprise.

 

La multiplicité des informations utilisées dans la décision de crédit

Tout au long de sa démarche, l’analyste fait le lien entre :

  • Les données chiffrées, la connaissance de l’entreprise et de son secteur d’activité,
  • La solvabilité, le respect des engagements, les comportements de paiement, le positionnement sectoriel, les perspectives d’évolution du marché, les relais de croissance, les investissements actuels et futurs d’une entreprise.

Toutes ces informations sont apportées par l’analyse des chiffres, de l’environnement économique et par l’entreprise elle-même. Ainsi, en ne portant son attention que sur certains éléments, le credit manager découvre derrière chaque chiffre, indicateur, information à sa disposition, une histoire dans la construction de son diagnostic financier.

Il compile et synthétise l’ensemble des informations afin d’obtenir une « photographie » réelle des risques pour permettre une prise de décision éclairée conformément à la stratégie de l’entreprise et à la croissance du chiffre d’affaires, et ce toujours dans les limites de la politique de crédit.

 

Le système expert et les règles métier, une aide à l’automatisation des décisions de crédit

Ce processus d’analyse humaine est parfois automatisé par un système expert capable de reproduire des mécanismes cognitifs. Celui-ci simule un raisonnement sur un ensemble de règles « métier » pour aborder une situation, sur la base de scénarios reposant sur les notions de rentabilité, de solvabilité et de performance opérationnelle de l’entreprise étudiée.

Cette approche est une aide logico-mathématique conçue pour qualifier les séquences du raisonnement à partir de mécanismes de logique formelle en utilisant le raisonnement déductif. Elle imite le jugement de l’expert dans un environnement autorisé d’information, de champs d’investigation et de règles bien définies.

Cependant, si un tel système peut être synonyme de gain de temps pour disposer d’une vision synthétique de la décision, l’absence d’intuition humaine sur des situations complexes ou nouvelles peut fausser la décision finale. De plus, cette approche nécessite de disposer de données à jour et qualifiées pour apporter la bonne décision.

 

Le « scoring application » de machine learning, outil de prédiction statistique

Là où un système expert va s’attacher à reproduire les décisions de comportement humain en suivant des règles strictes et précises, les modèles fondés sur l’Intelligence Artificielle (IA), comme par exemple le score de probabilité de défaillance, est purement statistique.

Le scoring est une application de « machine learning » construite sur un modèle prédictif de probabilité. Cette science de la donnée se fait autour des techniques de corrélation (mesure l’intensité d’une liaison entre deux variables), de régression (analyse la relation d’une variable par rapport à une ou plusieurs autres) ou de dépendance et de causalité de données simples ou agrégées.

Pour la décision de crédit, c’est une véritable révolution. Il existe bien évidemment dans ces algorithmes toujours une part d’incertitude que l’on est forcé d’accepter dans l’automatisation des décisions. Tendre vers l’Intelligence Artificielle est une invitation à réfléchir sur une nouvelle rationalité dans la prédiction de comportement.

C’est un moyen d’automatiser en temps réel la décision de crédit sur des portefeuilles de tiers important. Cette approche prédictive permet au credit manager de gérer ses tiers avec davantage de sécurité et de justesse malgré des données incomplètes. Cela lui permet de se concentrer sur les entreprises nécessitant un suivi plus fin.

 

L’élimination des biais au coeur des avantages accordés au machine learning

Le machine learning a également pour avantage d’éliminer les biais comportementaux et cognitifs de l’homme en privant l’intervention humaine de fausses interprétations dans les probabilités de défaillance. Cependant, il faut disposer de suffisamment de données à disposition dans la création, l’élaboration et la maintenance de modèle prédictif pour calibrer les courbes de probabilité de défaut au plus haut pour classifier le risque.

De plus, le machine learning appliqué à des données de mauvaise qualité peut aussi conduire à des biais. Il est souvent préférable de dépenser plus d’énergie dans la collecte et le nettoyage des données que dans la création de modèles très complexes. L’Intelligence Artificielle est donc un outil précieux, à condition d’être judicieusement utilisée dans la chaîne d’évaluation des risques afin de prédire la défaillance.

 

Analyse financière humaine, système expert et scoring, des outils complémentaires en credit management

En conclusion, la mise en parallèle de ces trois méthodes d’analyse du risque de crédit permet de constater leur complémentarité dans la prise de décision. Avec la digitalisation des processus et l’avènement du big data, la décision de crédit est à un carrefour entre l’anticipation du retard de paiement, de l’impayé, ou de la défaillance. Ainsi, les technologies transforment le métier du credit manager. Devant la multiplicité de ses tâches, il va désormais pouvoir se concentrer, sur les entreprises les plus litigieuses.

Aujourd’hui, la valeur ajoutée du credit manager se trouve dans l’examen critique d’informations internes et externes à l’entreprise étudiée. Les éléments d’appréciation peuvent être variés, voire complexes, mais leur compréhension souvent imparfaite apporte très souvent des réponses ou des explications utiles à la prise de décision de crédit.

Pour conclure, quelle que soit la méthode utilisée, l’évaluation du risque client reste entre les mains du credit manager dans une logique de préservation de la trésorerie. Celui-ci peut, accorder ou refuser un crédit interentreprises dans l’entrée en relation, diminuer, maintenir ou renforcer un encours de crédit, continuer ou arrêter une relation d’affaires avec certains clients existants ayant des profils à risque fort. Fixer les délais de paiement et le calendrier des échéances, gérer les retards de règlement, limiter les risques d’impayés, organiser les procédures de relance et traitement des procédures contentieuses… Telles sont les missions quotidiennes du credit manager.

 

Typologie d’information
 

 

Eléments factuels facilement valorisables par l’IA

  • Caractéristiques de l’entreprise
  • Chiffres clés – Traitement des comptes annuels – capitaux propres, ratios économiques, rentabilité, liquidité, structure financière
  • Etudes prospectives des comptes selon les scénarios
  • Données sectorielles, analyses des signaux faibles
  • Comportements de paiement interne ou externe
  • Nature de l’actionnaire
 

 

Eléments intangibles difficilement valorisables par l’IA

  • Qualités de l’équipe de direction
  • Projets d’investissement et perspectives de croissance
  • Soutien de l’actionnaire
  • Carnet de commandes et prévisions
  • Qualités du portefeuille client, de la supply chain ou du circuit de distribution
  • Analyse de la presse, du secteur économique